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Sans toit ni loi, tra la perduta gente

20 novembre 2008 Lascia un commento

“Tout est là, mais ce n’est pas suffisant.
Mais peut-etre qu’il vous dira: j’existe encore.
Je suis comme celui qui portait toujours une brique
pour montrer au monde entier 
comment avait été un jour sa maison”  
Bertold Brecht

 Quelque part en 1997
Fugitif, introuvable, en cavale… ou simplement ailleurs? Peu importe. J’avais été remis en liberté, éphémère illusion avant mon extradition. J’ai profitè de cet intermède pour m’en aller. J’ai repris à nouveau le large, quittant un radeau de réfugiés, abri précaire pour des vies bannies, des existences souspendues, flottant devant la porte d’une Ithaque imaginaire.
Comme le marin s’adressant à son capitaine dans la chanson, je me disais: ” S’il existe encore une part du monde, je suis pret. Nous pourrons y aller.”
Voilà trois ans que m’etais volatilisé, dématérialisé, fantomisé. J’ai replongé dans la vertige de l’inconnu. Depuis, je suis nulle part et partout.  Je n’ai pas de consistance. Je suis presque une apparence, mais il y a toujours ma présence.
J’existe sans exister. Je suis l’un de ces hommes qui ont perdu leur ombre, ou peut-etre suis-je l’ombre d’un homme qui fut? Eternel Godot qui attend son temps, mon futur est un présent dilaté fait de passé. Demain sera encore comme aujourd’hui, égal à hier? Ici, c’est le passé qui dure longtemps, douloureuse nostalgie du présent. Je n’arrive pas à rattraper mon lendemain.
Il est toujours un peu plus loin. J’ai été révolté; donc, j’étais. 
J’ai été, donc, je pourrai etre. Je pourrai etre, donc je me révolterai.
Je me révolterai. Donc, je serai, nous serons. Cependant, ma vie s’ecoule, se déplie, se déroule. Je suis aérien et nebuleux, je reste un etre suspendu. Homme de lisiére, je parcours des territoires frontaliers, chaque abri est provisoire, aucune maison est la mienne, tous les lits sont pour une seule nuit.
Subversif et communiste: pour les Etats, je suis un terroriste. Fuyard, en cavale, je suis devenu un marginal, un illégal, un exclu qui refuse d’etre reclus. J’ai appris ma présence immatérielle et ma dimension virtuelle.
Cette liberté sera-t-elle l’unique possibilité existentielle, ou le seul futur annoncé à l’horizon est-il de métal et de béton?
Je vis sans demeure et sans pays. Mais, en dépite des apparences, je persiste. 
Nécessité est de ne pas céder. Sans toit, ni loi, on pourrait me croire disparu. Mais je suis toujours là, parmi les gens perdus.
        Paolo Persichetti, Exil et chatiment